mercredi 21 juillet 2021

Le vaccin, en toute liberté

La liberté n'est pas un droit, c'est un devoir, et pas n'importe lequel : celui d'être à la hauteur des enjeux de la société dans laquelle nous vivons.


Me voilà donc vacciné, de mon plein gré.

 

Dans le hall de l'aéroport, qui tient lieu de centre de vaccination pour les habitants des alentours, je mis à profit les quinze minutes d'observation suivant l'injection pour parcourir le fil d'actualité de mes réseaux sociaux, à peine distrait par les manoeuvres d'un avion commercial et le passage plus agréable d'une fille aux jambes filiformes. J'y découvris, comme tous les jours depuis un an, des propos énervés et compulsifs, parfois de bon sens, souvent - loi du genre en de tels lieux virtuels - que j'estime saugrenus. Mais, après tout, je ne m'en suis jamais indigné : la liberté d'expression, c'est en accepter avant tout le principe pour les bretteurs qui pensent différemment sans les accuser de proférer des "fake news", d'être des extrémistes ou de se comporter tels des moutons. 

 

Je n'ai pour autant jamais été de ceux qui perçoivent des complots à chaque recoin de l'actualité : les théories qui font mine de les révéler ne sont qu'un énième prêt-à-penser, pas tellement différent en somme des communications officielles, à la différence près que les premières s'adressent à ceux qui s'opposent à tout pour le principe de s'opposer et les secondes à ceux qui boivent comme du petit lait les paroles du gouvernement et des experts. De surcroît, si la démocratie souffre de nombreuses contusions dans nos contrées, notamment en matière de liberté d’expression et de pluralité des opinions, nous ne sommes pas entrés en dictature. A ce titre, les comparaisons entre le pass sanitaire et l'étoile jaune, énième exemple de reductio ad hitlerum, devraient être d’emblée disqualifiées en raison de leur abjection.

 

Dans le torrent de témoignages qui me furent adressés depuis un an, la réalité à laquelle mon bon sens a incliné à accorder davantage de crédit émane du personnel médical m’ayant relaté l'horreur de voir tant de patients plongés dans le coma sans certitude d'en sortir, allongés et affolés par l'issue incertaine, mourant sans parfois pouvoir dire adieu à leurs proches. En l'occurrence, le vaccin est le pari à tenter pour assurer au plus vite un retour à une certaine normalité. "Un petit pas pour l'homme, un grand pas pour l'immunité", ai-je entendu, il y a quelque temps, au détour d'un débat houleux sur une de ces chaînes où l'information tourne en continu avant de finir par se mordre la queue. 

 

Le vaccin aura peut-être des effets néfastes à long terme. Peut-être pas. Sans doute pas. Tout comme il n'en a pas eu juste après son injection alors qu'une hécatombe de thromboses nous était promise. Pour le meilleur et pour le pire, la science est la fille turbulente de notre civilisation. Pour le meilleur, par le développement de nouvelles technologies améliorant le quotidien, les progrès de la médecine, le recul des épidémies. Pour le pire, par l'entrée dans une nouvelle ère qui aboutira à la robotisation, à la déshumanisation et au transhumanisme, à un monde sans croyances. Souvent, les progrès comme on les nomme avec déférence quand il s'agit de science sont à la croisée entre ces considérations, nous rappelant que nous ne saurions nous exempter d’une approche philosophique.

 

J'ai donc choisi, en toute liberté, de renouer avec la vie intense en faisant le pari de la vaccination, pas tellement pour moi, ayant toujours tout mis en oeuvre pour être en bonne santé, encore moins pour obéir au gouvernement ou aux experts envers qui j’éprouve une certaine aversion, mais pour faire vivre la société à laquelle j’appartiens. Si je ne suis pas favorable à l'instauration d'une obligation en la matière, j'en estime pas moins que la question ne devrait pas se poser : se faire vacciner relève de notre responsabilité. Pour nous, issus de générations n'ayant pas connu la guerre, il s'agit du seul et infime acte sortant de l'ordinaire que nous aurons eu à poser jusqu'à présent pour nous assurer de vivre à nouveau ensemble.

 

La vaccination est aujourd'hui le choix de la liberté individuelle et collective. De la liberté pour les autres, la plus belle d'entre toutes.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire